Ma tres chere Soeur.
Je suis fort faché d’aprendre par Votre lettre que vous soufréz encore de Vos Vieilles
incomoditéz, et que Vous n’auguréz pas aussi favorablement de Votre Voyage que Vous
L’avéz fait au comansement, vous deviéz bien Vous atandre a ce qu’on vous fit toute
La Meilleure reseption[,] et a trouvér la Cohûe autour de Vous; mais[,] permetéz moy de Vous parlér franchement[,] n’y auroit-il pas quelque petite Jalousie qui Vous tracasse La bas? je n’ause presque
Vous Le Dire[,] mais je m’en doute; vous etes[,] Ma chere Soeur[,] dans un païs, ou la Conquete des femes n’est pas difficile, et ou peutetre meme[,] par prevenance pour Les etrangérs[,] on fait les avansses, vous deviéz vous y atandre[,] et partir[,] toute preparée a cette sorte de passience[,] pour Monpeiller, j[’]ai lu dans je ne sai quel Livre qu’une persone nomée le sentiment deveint amoureuse
d’un papillon, quand elle croyoit Le tenir[,] il s’envoloit pour butinér Sur un partere[.] elle Le pourssuivoit toujours[,] et il lui echapoit autans de fois, elle se Desesperoit[,] Ses beaux jours S’ecouloient dans les Emüs[;] elle fut meme jalouse du partere qui Lui enlevoit Son chér papillon, Sur quoi passa
une fée[,] nomée Morale[,] qui Lui dit[:] [«]de quoi vous affligéz Vous[,] mon cher Enfent[»] elle Lui repondit[:] [«]de ce qu’un papillon que j’aime si sincerement se [est ]trouve Le plus Volage des Animaux[»], reprit La fée[:] [«]Vous [q… ]Vouléz donc qu’un papillon ne Soit pas papillon, c’est demendér du bonsens a la folie,
des sentimens aux rochér, c’est[,] en un mot[,] vouloir que le Torau ait des Ailles et Les aigles des Cornes[;] | c’est Se Chagrinér de ce que les rivieres Coulent sans S’aretér[,] et que Notre Globe decrit Sanssaice la meme elipse autour du Soleil, on ne Change
point la nature des Choses[,] ni Les Jnclinations qu’on aporte au Monde en Naissance, mais[,]si ce n’est pas Vous demandér L’Jmposible, Disipéz votre Jalousie[,] rejouisséz vous lorsque votre chér papillon vient a Vous[,] et acoutuméz Vous a Voir qu[’]il vous quite Souvent.[»] vous diréz peutetre[,] Ma chere Soeur[,] que ma fable est une Sote[,] et celui qui Vous L’ecrit un Jmpertinent[,] et que Vous savéz tout cela mieux qu’on ne peut vous le Dire, je Vous demande pardon
de ma hardisse [hardiesse], mais[,] Contéz sur ce que mon amitié prens La liberté de Vous dire[,] vous ne seráis heureuse et ne vous remetréz de Vos Jnfirmitéz que lors que Votre
Coeur Genereux se sera entierement Vaincu Lui meme. Je fais mile voeux pour Votre
Santé et pour Votre Contentement pour la nouvele année en Vous assurent que personne
ne Vous est plus ataché et [est][? ]que perssone n’est avec plus de tendresse que[ moi][,]