Lettre | 1896_04 |
---|---|
Date | 1896-02-28 |
Lieu de création | Paris |
Auteur | Fantin-Latour, Henri |
Destinataire | Scholderer, Otto |
Personnes mentionnées | Daumier, Honoré Millet Vélasquez, Diego Berlioz Leighton, Frédérick Sedelmeyer, Charles Tempelaere, Gustave |
Lieux mentionnés | Londres, Royal Academy of Arts Paris, Salon Rome, Sciarra-Colonna, collection Woodstock (Oxfordshire), Château de Blenheim |
Œuvres mentionnées | F La toilette F Vénus et les Amours S The Little Flowerseller/ Die kleine Blumenverkäuferin (la petite marchande de fleurs) |
J’ai été très content de savoir que les Daumier vous avaient fait plaisir. En vous les envoyant, j’étais sûr que cela vous intéresserait. Tous les jours sa réputation grandit ; on s’aperçoit que ce caricaturiste (comme on l’appelle) était un grand dessinateur et que l’effet qu’il a produit a été très grand sur ses contemporains, Millet particulièrement en a été très influencé.
Je commence à avoir une très belle collection de ses œuvres et plus elle s’augmente, plus je l’admire !
Votre VelasquezVoir lettres 1896_02 et 1896_03. est très beau, mais aura-t-il le même succès parmi les amateurs que parmi nous ?
J’en ai parlé à un marchand qui avait vu sur mon chevalet la photo et qui m’a dit : « C’est peu de vente, ici, comme partout, le monsieur n’est pas intéressant et la peinture ancienne ne se vend guère, à moins que cela ne vienne d’une grande collection comme Sciarra,La collection Sciarra-Colonna se trouvait à Rome, elle était constituée d’un remarquable ensemble de peintures des XVIe et XVIIe siècles, elle fut vendue et dispersée en 1900. BlenheimChâteau de Blenheim, résidence des ducs de Marlborough, dans lequel est conservée une importante collection de peintures, tapisseries et porcelaines. etc. … [ »]
Il faut dire que le marchand dont je parle vend des tableaux modernes. Je ne puis vous recommander personne ici. Il y a SedelmeyerCharles Sedelmeyer, un grand marchand de tableaux d’origine viennoise dont la galerie était située 4 bis rue de La Rochefoucault à Paris. qui a de la peinture ancienne, mais je ne [le] connais et ne peux vous le recommander.
Je fais pour le Salon le tableau que vous voyez dans ma photo.La toilette, F.1612 et Vénus et les Amours, F.1613 sont les deux tableaux que Fantin envoie au Salon de 1896. J’espère que ce tableau va me rendre fashionable à Paris, comme vous dites.
Je ne me plains pas, j’ai un marchand qui m’achète tous les tableauxFantin a rencontré le marchand Gustave Tempelaere en 1887. Celui-ci, à l’inverse de Mme Edwards, ne lui impose pas de genre et accepte toutes ses œuvres d’imagination. C’est ainsi que la relation artistique, commerciale et amicale se renforcera d’année en année jusqu’au décès du peintre. que je fais dans le genre de celui que je fais pour le Salon ; enfin je peux faire les choses que j’ai désiré faire ; le seul ennui, c’est de ne pas être jeune !
Cela me fait penser à ce que répondait Berlioz quand, à la fin de sa vie, on le félicitait de ce que le public venait à lui, oui, disait-il, on vient, mais moi je m’en vais !
Moi aussi, la mort de Leighton m’a impressionné ; nous nous étions connus au Louvre, mais nous ne tardâmes pas à ne pas nous entendre. Je l’avais perdu de vue ; en 89, à l’Exposition, nous ne parlâmes pas.
Je ne suis pas de votre avis sur les Russes, mais cela tient peut-être à ce que je les connais plus que vous et que j’en suis un peu. Il y a toujours un peu du cosaque quand on les gratte, dit-on, mais il y a aussi du Grec et du Polonais, voilà bien des choses pour ne pas pouvoir compter dessus.
Quel singulier hiver nous avons ! Doux et sombre pour travailler. Comment faites-vous à Londres ? Ici ces brouillards sont bien gênants. Vous ne m’avez pas parlé de vos projets pour l’Academy ?En 1896, Scholderer envoie à l’Academy The Little Flowerseller/ Die kleine Blumenverkäuferin, B.433.
Compliments et amitiés de nous deux pour madame et Victor. Tout à vous. H. Fantin