Correspondence Fantin-Latour & Scholderer

6. Bedford Gardens, London

31 Déc.1894

Mon cher Fantin,

Nous vous envoyons nos meilleurs souhaits, ainsi qu’à Madame, pour la nouvelle année et c’est toujours la santé qui devient de plus en plus la chose la plus importante, nous espérons que vous en jouirez dans l’année prochaine.

Je viens de retourner d’un voyage en Silésie, et j’ai passé quelques jours à Berlin et Francfort, j’y suis allé pour faire un portrait, c’était bien peu pour un si long voyage, mais dans ces mauvais temps il faut accepter ce qui se présente.

J’ai fait une petite exposition de mes natures mortes à Berlin et à Francfort, mais avec peu de succès pécunière, quoique les tableaux ont beaucoup plu.

Il y a longtemps que je n’ai eu de lettres de vous. Mad. Edwards nous donne cependant des nouvelles de vous ; j’espère que vous allez bien. Je suis curieux d’apprendre ce que vous ferez pour le Salon prochain. Je n’aurai que des portraits cette fois, et pour l’Académie, j’espère aussi de faire un tableau de nous trois, dont j’ai fait une esquisse qui me donne de l’espoir. Je viens de voir Thoma qui toujours fait des choses fort intéressantes et quelquefois très belles. Ce qu’il dit sur l’art, quoique cela soit très peu, aussi est toujours du plus grand intérêt pour moi. Il a fait aussi une série de lithographies, toutes espèces de sujets, quelque fois il y ajoute de la couleur et les change en tableaux d’une manière bien étonnante, mais tout cela est bien difficile à expliquer.

L’été a dû être mauvais aussi pour vous à la campagne, nous avons été au nord de l’Angleterre pendant les vacances de Victor et il faisait bien mauvais temps dans un pays charmant ;Du début août à septembre, Scholderer séjourne dans le North Yorkshire, à Kirkdale Church et à Pickering. ma femme malheureusement était souffrante pendant ce temps, ce qui n’a pas non plus contribué à nous rendre notre séjour bien agréable. La santé de ma femme n’a pas fait des progrès depuis l’année passée, mais comme cela n’est pas devenu pire, nous devons être contents.

Victor a grandi et se porte bien, mais il est à l’âge ou le corps se développe aux frais de l’esprit, il n’est pas du tout intéressant en ce moment. Il est plus grand que sa mère et aura bientôt dépassé ma hauteur.

Adieu, je vous prie de m’envoyer bientôt un mot ce que vous faites, de vos santés et de votre art, j’espère que vous ayez commencé un tableau important pour le salon. A vous et Madame, nous envoyons nos meilleurs compliments et je vous prie de nous rappeler aux bons souvenirs de Madame et Mademoiselle Dubourg.

[n.s]