Briefwechsel Fantin-Latour & Scholderer

8 Clarendon Rd Putney

29 Déc [18]78

Mon cher Fantin,

Nous sommes tellement touchés, flattés, enchantés de vos aimables lettres que nous ne pouvons résister de venir à Paris pour vous voir ; mais je crois que c’est plus sage de venir à notre retour de Francfort, puisque le but principal que je dois avoir est de faire la copie du portrait.Bagdahn identifie cette œuvre de Scholderer comme étant Kopie eines Porträts von 1856 (sic) in Frankfurt, B.175. On ne connaît cependant pas le portrait original de 1856. <Notre adresse à Francfort : 29 gr. Eschenheimer> Ce sera donc à la fin de janvier j’espère, que nous viendrons. Ma femme me charge de remercier Madame de son aimable lettre, et aussi Mademoiselle Esch de la sienne. Nous sommes déjà en train d’emballer nos effets, nous partirons le soir du dernier décembre.

Je vous enverrai demain les esquisses dans le paquet, vous trouverez un petit cadeau de ma femme, un couteau à découper et fourchette qu’elle vous prie d’accepter, nous espérons que cela vous sera utile dans le ménage.

Je crois bien que c’est difficile à déchiffrer une lettre de Mewburn, tous ses amis se plaignent de son écriture. J’ai jugé le procès de Whistler comme vous, seulement je trouve les témoins artistes plus bêtes encore que les autres, les magistrats se font toujours plus bêtes qu’ils ne soient pour stimuler la bêtise des témoins.John Ruskin attaque Whistler dans sa lettre mensuelle du 2 juin 1877 « Fors Clavigera » au sujet du prix demandé pour une toile, Nocturne en noir et or. Falling Rocket (YMSM.170, 1875, huile sur bois, 60,3 x 46,6 cm, Detroit, Institute of arts), exposée lors de l’ouverture de la Grosvenor Gallery (mai 1877). Whistler poursuit Ruskin en diffamation et le procès a lieu le 25 novembre 1878. Whistler obtient symboliquement gain de cause. Je crois que cela n’a pas fait du tort à Whistler, il faut connaître les Anglais et savoir quelle importance le jugement d’un homme comme Ruskin a pour eux. Ces critiques d’art sont plus mauvais que tous les autres, Ruskin n’a été ni spirituel, ni vrai, seulement insolent et vulgaire, je crois vraiment que cela a fait du bien à Whistler.

Je verrai ce qu’on peut avoir de Menzel à Francfort, voulez-vous la cruche cassée (je crois que c’est ce que nous avons vu à Paris, une espèce de conte illustré)Menzel, « La cruche cassée », Bock 1096-1125, série de lithographies exécutées en 1876-1877 pour illustrer la pièce de théâtre du même nom de Heinrich von Kleist (1811). je crois qu’on puisse y trouver tout.

Quelle chance que le froid a diminué, cela aurait été terrible pour voyager.

C’est bientôt à vous maintenant de venir nous voir à Putney, j’espère que vous y pensez. Adieu, nos meilleurs compliments à Madame et à Mlle Esch, bien des choses de ma femme à vous. Votre ami Otto Scholderer